par A. Wamara
Mort. Depuis longtemps. C’est ce que j’aurais voulu être.
Pas que je veuille mourir là, maintenant, non, trop tragique.
Et puis, je ne suis pas du genre à me jeter sur une épée. Non.
Je me pense plutôt mort depuis belle lurette, et mes descendants
auront déjà fait et fini leur deuil, m’auront oublié si ce n’est
peut-être une visite au cimetière à chaque passage de comète pour y déposer des fleurs,
papoter un brin derrière ma stèle sur le temps qu’il fait,
et finir sur un goûter en fin de journée. Je ne reviendrais à leurs souvenirs
qu’au détour d’une fête autour d’un album qu’on feuilletterait sans pathos,
où j’apparaîtrais en culotte courte. Le temps passé après ma mort se serait peu à
peu estompé jusqu’à s’évanouir et déserter totalement les esprits des vivants,
ou qu’il se serait déjà effacé comme le temps sans consistance d’avant ma naissance.
L’expression convenue « repose en paix » n’aura aucun intérêt puisqu’elle aura perdu
toute sa pertinence à mon sujet.
C'est ça le paradis, reprendre son inexistence en rejoignant le temps d'avant naissance,
y compris dans la conscience des vivants.
Une sorte d'ancestralité à-venir.