L'enfant aux deux langues ,
par Claude Hagège
Editions Odile Jacob, 1996, 298 pages.

Le problème de l'acquisition par l'enfant de la deuxième langue est fort débattu.
A quel âge ? Quelle langue ? Comment faut-il procéder ? C'est à ces questions que l'auteur, convaincu de la nécessité d'une éducation bilingue précoce, tente de répondre : "le succès d'une éducation bilingue précoce fournit (...) un contrat d'assurance pour le multilinguisme ultérieur" (p. 80). L'auteur préconise l'apprentissage d'une deuxième langue (autre que la langue maternelle) dès le cours préparatoire (soit à l'âge de six ans). Ce qui n'exclut pas, avant cet âge, notamment au sein des couples mixtes, d'appliquer ce qu'il appelle le principe de Ronjat, à savoir que chaque parent s'adresse à l'enfant dans sa propre langue maternelle afin que celui-ci assigne à chacun d'eux une langue différente. L'éducation précoce s'impose, selon l'auteur, du fait, d'une part, que l'enfant est pourvu dès sa naissance, de part son organisation neurologique, d'une aptitude innée à l'apprentissage des langues, et, d'autre part, que l'âge de 10-11 ans constitue le seuil fatidique au-delà duquel la bilingualité révèle ses limites. Fait surprenant, l'auteur écarte d'emblée l'anglais, "péril pour les autres langues" (p. 153) puisque, soutient-il, "sa large audience lui confère une position assez forte pour qu'il ne subisse aucun préjudice de cette absence" (p. 154). Justement, du préjudice que subissent les langues immigrées, l'auteur ne dit mot. Mieux, elles sont exclues de la liste des deuxièmes langues préconisées avec force (français, portugais, espagnol, italien, allemand). Pourtant, il ne se fait pas faute de signaler qu'"il est essentiel, pour une acquisition correcte de la deuxième langue dans un contexte d'immersion, que l'enfant possède (...) une bonne compétence dans sa langue maternelle" (p. 118), ou que "la voix de la paix passe par l'ouverture à la langue du prochain" (p. 112). Entendez européenne.
Exclusivement !

Achour Ouamara
in Revue Ecarts d'Identité, n°76, mars 96.